[Animation] Vol à l'étalage.

C'est par une nuit sans Lune, une nuit déjà bien entamée, où le seul halo de lumière provient des quelques révèrbères encore en activité que se déroule cette histoire. Une part d'histoire dans la vie de deux jeunes vampires et encore ce n'est là qu'un battement, qu'une seconde dans leur interminable existence.

Eléa Lithien, l'incarnation même de la provocation. Un brin de femme qui n'en démord pas, sans mauvais jeu de mot. Kyna Parks, plus réservée, une jeune fille aux manières délicates.
Ces deux jeunes filles se sont retrouvées là. Heureux hasard diront certains, malencontreuse coïncidence diront d'autres. Mais les faits sont là et rien ni personne ne pourra changer le cours de leur instant présent.
Cette histoire fait intervenir un élément plus naturel, mais tout aussi imprévisible. Une autre jeune femme erre également dans les ruelles de la cité. Un brin de femme aux cheveux étonnamment blond, au teint de cire. Une humaine à qui le sommeil fuit au vu de l'heure tardive de sa sortie nocturne. Elle se prénomme Elnaria Aele, et elle non plus, ne se doute pas de ce qui va l'attendre.

Il n'y a pas un bruit dans la ville paisiblement endormi. Les prémices du printemps ont rendu hommage à la beauté de ce quartier de Tôkyo. La neige à commencer à fondre, doucement, prudemment laissant la trace de son passage sur les toits et les quelques endroits encore sous le couvert des ténèbres. Soudain, un vrombissement vient réduire à néant le silence environnant. Une vive lumière balaye la ruelle et gagne en intensité à mesure que le son se propage avec puissance. Un fourgon. Un fourgon blanc avec une large bande rouge en plein milieu traçant son sillon tout autour de la bête. En lettres capitales blanches, à l'intérieur même de cette bande horizontale, est marqué EMERGENCY. Quoi de plus équivoque. Comme si le simple fait de l'écrire en toutes lettres donnait tout son sens à cette camionnette. Le genre humain a parfois de drôle de préoccupations. A son bord, deux hommes, très certainement des gardiens au vu de leur talkie-walkie sur leur épaule droite. L'un d'eux semble avoir aperçu l'une d'entre vous au travers de la pénombre.
Vous apercevez ce bref passage et pourriez nullement le considéré, comme une vache regarde passer un train. Néanmoins, pour les deux femelles vampires aux sens on ne peut plus aiguiser, quelque chose semble vous titiller les narines. Le fourgon, en passant, vous laisse un goût plus que plaisant dans la bouche. Du sang. Une odeur très marquée de sang humain, sans compter celui des deux hommes déjà présents. Une imprégnation si forte que votre esprit y réagit subitement, comme un électrochoc, asséchant votre gorge au point d'en être douloureux.
Ce qui paraît étrange à notre fragile humaine, et qui aura échapper à nos deux vampires focalisés sur cet odeur de sang si puissante - dès qu'il s'agit de sang, ils n'ont plus que ça en tête ceux-là, affligeant - ce n'est pas tant de croiser une ambulance, mais le fait que les deux battants arrière soient verrouillés par une chaîne et un cadenas.
La fourgonnette se dirige droit vers l'imposant édifice d'un blanc aussi pur que la bure d'un archevêque. La croix rouge, venant renforcer ce sentiment écclésiastique, un réconfort pour certains, un dégoût pour d'autres. Au lieu de s'arrêter aux portes principales, le fourgon continue sa route et s'arrête devant une barrière jaune et rouge. Sur le côté un ilôt de surveillance. Un bras passe par la fenêtre passager et la barrière s'ouvre avant de se refermer, engloutissant l'ambulance. Juste avant que celle-ci ne pénètre dans le couloir sombre, un étrange martèlement, de bruits de tôles froissées vous parvient. Le convoi s'enfonce plus avant, puis bifurque derrière l'hôpital, se dérobant à vos yeux envieux.

Est-ce la curiosité pour l'une, ou cette soif inextanguible qui poussa nos deux vampirettes à s'aventurer plus avant ? Ou tout simplement un destin commun qui les aurait toutes réunies...Nul ne le sait et nul ne le saura jamais, car de cette virée banale, le cours de leur vie basculera inéluctablement. De quel côté de la balance ? Leurs actes seuls sauront le déterminer...

[PS: Veuillez bien garder l'ordre de postage établie par chacun(e)s d'entre vous. (Ex: L'entité, Kyna, Eléa, Elnaria puis de nouveau L'entité, Kyna, Eléa, etc...)]

Nuit noire. Le silence m'enveloppe, j'aime l'athmosphère particulière qu'il se dégage à cette heure-ci. Alors que des milliers d'âmes sont maintenant dans les bras de Morphée, le sommeil se refuse à moi.
Je marche simplement, sans buts. Humant les odeurs de la nature. Grimaçant par moments, lorsque mon odorat se trouve agressé par le désagréable fumet s'élevant des détrituts, ou par des reflux d'essence. Laissant mon regard s'attarder sur des temples shintoïstes, des parcs bien désuêts au regard des buildings environnants... Sans pourtant vraiment les regarder.
Je traverse de nombreux quartiers de Tokyo, sans réellement en prendre conscience. Shinjuku, Harajuku, Shibuya, Roppongi. Je m'y arrète, dans ce grand temple boudhiste où nous allions avec maman. Il symbolise parfaitement, selon moi, le Japon d'aujourd'hui. Placée face à lui, je peux en apprécier le côté traditionnel. Sur ma droite s'alignent de petites statuettes, représentant les âmes d'enfants morts. J'ai toujours aimé les regarder, sûrement grâce à ces petits girouettes colorées posées derrière chacune d'elles. Et, derrière le temple, la tour de Tokyo... La modernité... J'ai devant moi les deux facettes de mon pays.

Je resserre la ceinture de ma veste. Je souris, en pensant au regard de Finlay lorsque je l'ai portée la première fois. Il m'a avoué l'avoir aperçue en passant devant une des vitrines de ces magasins chics, au centre-ville. Immédiatemment, il a décrété que cette veste était faite pour moi. Et s'est précipité à l'intérieur du magasin Chanel.
J'en apprécie cette nuit le confort, et surtout, la chaleur qu'elle me procure.
Après un soupir, je décide de retourner du côté de Shinjuku.
J'observe sur les trottoirs les nombreux hommes qui dorment. Ils se sont aménagés des lits de fortune, avec des cartons, et des oreillers. Leurs costumes trois-pièces, leur attaché-caisse, détonnent avec leur condition. Encore une facette du Japon. Le prix d'un loyer à Tokyo est faramineux...
Mon errance me mène finalement devant un hôpital. Je lève la tête vers les étages. Certaines chambres sont allumées. Est-on en train d'y mourir ? D'y célebrer une naissance, la rémission d'une maladie ? L'angoisse noue t-elle les entrailles de ces hommes et femmes ? Peut-être tout simplement la maladresse d'infirmières qui, oubliant que ces personnes grabataires sont également des êtres humains, n'ont pas jugé utile d'éteindre la lumière.

Je suis sortie de mes interrogations par une lumière qui éclaire la nuit, accompagnée d'une sirène stridente.
Je lis EMERGENCY sur la fourgonette qui vient de surgir. Quelqu'un en train de mourir ? Au vu de la vitesse à laquelle elle roule, je suppose que oui.
Cependant, un détail soulève de nombreuses questions : Pourquoi ces chaînes, pourquoi ce cadenas ? C'est invraisemblable... A moins qu'il ne s'agisse d'un yakusa extrèmement dangereux ? Ou ... ?
J'apercois deux hommes à l'intérieur, mais ils n'ont rien de soignants : leur posture, leurs talkies-walkies... Tout cela me semble illogique, et me laisse supposer que cette fourgonnette cache autre chose qu'un mourrant. Je souris, je sens se réveiller ma curiosité. La camionnette passe une barrière de sécurité, et s'enfonce à l'arrière de l'hôpital. J'hausse un sourcil. J'ai bien entendu un martellement ? Quel bruit étrange. Non, vraiment, tout ce manège m'intrigue.
Deux jeunes filles sont également devant l'hôpital, séparément. J'en distingue légèrement une, brune. Elle s'avance pour mieux observer la camionette. Je ne suis pas la seule à me poser des questions.
La seconde, je ne la vois que peu. Elle m'est dissimulée par un mur. Ses cheveux me rappellent quelqu'un... Kyna, la jeune femme qui m'avait sauvée d'une mort certaine, il y a quelques semaines... Il faudrait d'ailleurs que je la retrouve, afin de la remercier. Quelle ingrate je fais.

D'un pas de loup, je marche vers la direction où a disparu la camionette. Ma veste est noire, je devrais pouvoir me fondre dans la nuit... Du moins je l'espère.
Je veux en savoir plus.
Je contourne très largement le poste de surveillance, jusqu'à trouver LA faille : un mur ... Sous lequel se trouve un arbre. Je grimpe avec une agilité déconcertante à celui-ci, et me hisse sur le mur. Je souris en repensant à mon père dont le visage prenait une couleur rouge écrevisse lorsqu'il me voyait arracher mes habits dans les arbres. Non, vraiment, ce comportement de petit singe n'était pas digne d'une jeune fille de mon rang.
Je saute sans hésitation de l'autre côté du mur, et court avec légèreté jusqu'à une grande porte, semblable à celles d'un hangar. La fourgonnette se trouve devant... Arrivée à une quinzaine de mètres de celle-ci, une présence me fait sursauter. Kyna Parks.
J'écarquille les yeux, balbutiant une phrase que moi-même je ne comprends pas.
Elle ne remarque pourtant même pas que je suis à quelques pas d'elle, elle semble comme hypnotisée par autre chose...
Son regard se perd vers l'objet de ma curiosité.
"Kyna ? Lady Parks ? Je suis Elnaria... Vous... Vous rappelez ?"

Kyna Parks avait passé la journée à sillonner la ville de long en large. Les heures s’étaient écoulées interminablement et la jeune fille avait le moral à bas. La nuit dernière, elle avait sauvé une jeune femme, Elnaria, d’une mort certaine. Cette dernière allait bousiller sa vie lorsque Kyna était arrivé et l’avait ramenée à sa demeure.

Ce soir-là, la lune était au commencement de son cycle et brillait donc par son absence. Kyna Parks était vêtu d’une petite robe en satin rouge foncé où de petites cordes noires retenaient le tissu dans son dos. Le décolleté de la robe plongeait sans trop montrée sa poitrine et son diamant pendait à son cou. Elle chaussait des mocassins en cuir rouge comme sa robe. Ses longs cheveux blonds translucides étaient détachés et tombaient en cascade dans son dos.

Le bruit d’une sirène brisa le silence religieux de la nuit tandis que les gyrophares du véhicule de secours éclairaient la ruelle d’une lueur sinistre. Kyna traça du regard les contours de deux hommes. De son regard perçant, elle les observa. Elle eu l’impression que l’un deux les regardait, elle et l’autre femme vampire près d’elle. Kyna Parks connaissait la jeune femme sous le nom d’Eléa Lithien. La vampyr qui se tenait à ses côtés était réputé pour son arrogance et son imprévisibilité. Cette dernière avait l’air physiquement plus âgé que Kyna.

Kyna Parks mordillait l’un des anneaux qui faisait le tour de sa lèvre. Une odeur à peine perceptible à l’odorat humain vint flotter autour des deux jeunes vampires, mais leur sens développé leur permit d’inspirer une grande bouffée de ce délicieux parfum au gout de fer. L’odeur délicieuse du sang que les deux femmes adoraient tant. Kyna sentait le goût de ce parfum exquis se déposer sur sa langue et envahir sa bouche. Ses sens en éveille, elle capta également le bruit produit par les deux cœurs humains qui battaient à tout rompre dans la fourgonnette. Tous ces facteurs mis au commun lui mirent l’eau à la bouche. Sa gorge était sèche, la soif la tenaillait. Kyna jeta un coup d’œil pénétrant à sa voisine. Ses yeux étaient habités par une lueur rougeoyante et flamboyante.

Le corps arqué, les yeux fixés vers le véhicule d’urgence, Kyna avança vers celui-ci, d’un pas lent. Seulement guidée par sa conscience ou plutôt son estomac qui réclama son dut. Personne ne sut si cet état était plutôt question de curiosité. Kyna n’en démordait pas. Elle entendit les pas distincts d’Eléa qui avait également emprunté le même chemin qu’elle. Mais un autre bruit, différent, troubla Kyna Parks. C’était plusieurs bruits qui se mêlaient l’un à l’autre. Kyna Parks prit le temps de les décortiquer un à un; un pas différent de celui d’un vampyr, Et en tendant bien l’oreille, Kyna entendit le battement d’un cœur ainsi que la respiration d’un être vivant. L’air entrait à grand flot dans les poumons de l’humaine, puis en ressortait. Kyna disait l’humaine, car il était bien évident à l’odeur de son parfum où bien de ses hormones qu’il s’agissait d’une femme.

Kyna détourna son attention de la femme et s’imprégna de l’odeur que dégageait la camionnette. Puis celle-ci disparut dans le bâtiment, attisant la curiosité de la jeune vampyr. Son regard de marbre fixait toujours le trou noir béat; obscurité dans laquelle c’était enfoncée le véhicule. Kyna laissa son instinct animal la guider et prendre le contrôle sur elle. Elle avançait à pas de loup, sans faire de bruit, légère comme l’air. Elle eut un moment d’hésitation se retourna discrètement afin de fixer la dame qui se tenait non loin. L’obscurité dessinait délicatement les trais de cette femme. De cette distance, Kyna pouvait déjà dire le goût qu’elle aurait entre ses dents. Un délice…

Puis une voix brisa le silence :

« Kyna ? Lady Parks ? Je suis Elnaria... Vous... Vous rappelez ? »

Elnaria? Ce nom lui rappelait quelque chose et une petite voix en elle lui dit qu’il ne fallait pas. Kyna était déchirée entre deux choix.

Suivre la camionnette ou bien déguster cette proie exquise?

Alors que les souvenirs d’Elnaria revenaient à son esprit et que son choix se faisait, déclarant la jeune fille comme une amie, Kyna sentie Eléa plier les genoux comme si elle s’apprêtait à ouvrir la chasse. Le déclic se fit beaucoup trop lentement, avant qu’elle ne réalise qu’Elnaria, son amie, était la proie.

Kyna Parks voulait retenir Eléa, mais l’odeur qu’avait laissée trainer le mystérieux véhicule l’obsédait.